Sur quatre murs
Le coin du conteur
Ca n'est pas tant que l'on ait placé notre cheminée au centre de la maison, mais bien la maison qui s'est trouvée bâtie autour de notre foyer...
Les murs de chaumières l'ont toujours protégé, ceux de notre maison dans le jardin ne pouvaient y manquer.
Passée la porte d'extérieur, la première baie vitrée, à droite dans le couloir, donne sur le salon.
La cheminée fait face à deux portes fenêtre. Au mur, trois sous-verre de nos petits enfants (devenus grands) :
La première, aux prises avec des Pokémon,
La seconde, cherchant l'herbe d'automne noyée sous l'amoncellement des feuilles tombées,
Et la troisième, notre petite fille en danseuse, tutu-chaussons, chignon serré, en panne de sourire.
En face, les mêmes enfants. En noir et blanc. Une compositiion d'une dizaine de photos qui nous les montre grandir. De leur enfance de six ans à leur adolescence. Et dans l'angle, un champ de coquelicots tremblants au gré du vent de Provence, flamèches rouges nées de feux follets verts.
Née du délicat pinceau de Castagnol, qui a eu plus que moi le sens de l'équilibre des lignes, notre fascinante inconnue.
Sérénité ou ennui, elle semble attendre que la vie lui soit meilleure.
Teint de tendre rose sur fond violent de couleurs coquelicots, l'élégance des traits, de la pause, du visage niché entre la pointe de l'épaule et le creux de sa paume, tranche sous l'excès (à mon goût) du maquillage des yeux.
A chacun de regarder ce qu'il voit... la dame m'est et me reste une énigme qui fascine.
Quai Gabriel Péri, des peintres anonymes immortalisent sur le canson les belles inconnues. La liseuse et la leçon de piano mènent leurs vies de petites filles studieuses dans un autre angle de la maison.
Celle-ci habite à la maison.
Cette année là, elle s'était fait couper les cheveux.
Je l'appelais "Petit Pierre", du surnom d'un jeune personnage feminin qui avait à se faire passer pour un garçon dans un film de cape et d'épée.
Depuis 1978, son image trône au salon, entre les portes-fenêtres, en contre-jour de jour, illuminée par la cheminée les soirs d'hiver.
J'aurais dit "un Degas", ben non : c'est signé Picasso.
De sa période qui me touche puisque je la comprends.
La ballerine est gracieuse, le pied en gouvernail et le décolleté chaste malgré sa profondeur.
On la dirait sur un fil, cramponnant son bouquet comme d'autres s'accrochent à une ombrelle. Les fleurs ne sont pas son offrande. Ce qui l'est, c'est l'envolée, le souci de bien faire, le don que par son art la fille nous fait d'elle-même.
Cadeaux de fête des mères d'un gamin d'il y a une quarantaine d'années.
Avec le temps qui passe,
On s'imprime des souvenirs.
Dans nos maisons d'anciens
"L'attachant, dans nos maisons d'anciens,
Ce n'est pas la télé grand écran
Choisie sous prétexte de difficulté de vue,
La chaîne dernier cri
Qui joue toujours trop fort,
L'ordi inscousciant de mes carences d'anglais.
Tous ces outils qui se targuent
De faire "communiquer" entre eux
Les continents et les générations
Et qui nous babélisent
L'attachant, c'est ce que disent les choses
Près de nous.
Tout près...
Les choses de la terre
Et les choses aux murs.
L'attachant,
Dans nos maisons d'anciens,
Ce sont tous ces maillons
Qui tel' l'ADN
Vont d'une vie l'autre,
Et montrent d'ou l'on vient.
Comme le fil de Thésée
Qui le reçut d'Ariane,
Et qui lui permit
De retrouver le jour."
andré thiennot
vendredi 19 octobre 2007
gassin