Les harengs grillés

Publié le par aben

Petits plaisirs d'autrefois

La semaine dernière, dans le parc, j'ai brûlé mes tailles de haie et de fruitiers. Tous les ans à l'automne je fais un feu qui ressemble à ceux de camps.
Un bon feu, qui tient longtemps.
Je l'allume le matin, des brindilles de fagot bien rangés sur un journal froissé.
Quand la flamme devient claire, j'ajoute quelques petits morceaux de petit bois bien sec, toujours placés comme il se doit, qui laisse circuler l'air et les flammes le lêcher... La fête peut commencer.
Je tronçonne dabord, avec un sécateur, les plus petites ramures de bois vert.
Puis vient le temps pour la hachette de frapper d'un coup franc les morceaux jusqu'à aussi gros qu'un poignet de jeune fille.
Vers midi, je fais la pause.
Bien des branches plus grosses, débitées à la scie , ont été avalées par l'enfer en crachant de longues langues oranges. 
Quand je reprends l'ouvrage, le calme est revenu. Je trouve un tas cônique, de braises incandécentes, entourées du reste des morceaux les plus longs ou les moins bien rangés, qui se sont retrouvés en dehors du foyer.
J'étale un peu la braise et lui donne à finir les débris délaissés. Tout secs de la chaleur du foyer, ils s'enflamment en crépitant , se libèrent en postillonnant un étincellement de feu d'artifice de 14 juillet....
Je peux reprendre mon travail de néttoiement jusqu'au repas du soir.
Jusqu'à l'heure d'aller me coucher, je verrai par la fenêtre, le reste de braises rougeoyer.
Demain, sitôt lever, j'irai ouvrir les cendres et découvrir encore des braises.

Au temps de ma scolarité, avant donc mes 14 ans, un grand frère, de dix ans mon aînée, m'emmenait le jeudi bûcheronner en forêt.
Lui la hache ligottée au cadre du vélo, la scie attachée dans son dos, la serpe au crochet de soàn ceinturon et moi qui le suivait, le sac de trois coins à refendre et la musette de repas sur le porte-bagage.
C'était un vrai bûcheron mon frère. Pas un professionnel, mais qui savait y faire. Capable de diriger la chute d'un gros chêne, juste là où il faut , sans toucher ceux marqués qu'il fallait conserver, ça demande du métier...
On bûcheronnait l'hiver, on partait pour arriver tout juste au lever du jour, ne quittions le chantier qu'à l'arrivée de la nuit : trop dangereux sans voir clair d'utiliser les outils...
Il s'attaquait aux arbres les plus gros à grands coups de cognée, ponctués de "HAN !!!" vigoureux que tentent d'imiter aujourd'hui certains joueurs de tennis dans la télé.
J'ensterais les morceaux d'un mètre vingt sur quatre-vingt centimètres de longs et un mètre de hauteur.
Ca comptait pour un stère.
Je débitais de la charbonnette, j'ébranchais comme il m'avait appris à le faire. Je m'occupais du feu. Celui du jour, qui permettait de garder un chantier propre : rien de plus dangereux qu'un branche tordue qui traîne quand on tient en mains des outils affûtés.
Le feu de la veille servait pour le casse-croûte de midi. Vers onze heures et demi, il y enfouissait la gamelle, couvercle ouvert.
On sentait les odeurs, souvent celles de pôtées, de choux, de haricots, mijotant avec le lard du cochon d'un cousin...
Des fois, on n'emmenait pas la gamelle. On se faisait à manger !
Il fallait mettre plus tôt au feu, vers dix heures et demi onze heures. Et avoir amené la braise à l'incandécence voulue.
On commençait par enfouir des pommes de terre, dans leur peau, puis, plus tard, nos harengs, couchés sur le flanc, sur un lit de braises blanchissantes, recouverts de la même, puis de beaucoup de cendres chandes pour que l'air ne viennent pas réveiller le feu.

Des harengs dans la braise... aucun grand restaurants ne saurait en servir d'aussi bons que ceux que faisait cuire mon frère !
On soufflait pour faire tomber le trop de cendre puis on mordait dedans comme dans un fruit mûr.
La peau craquait, les arêtes avaient disparu, mangée par la chaleur, carbonisées sans être brûlées, la chair était restée moelleuse,

L'année du certif, j'en avais fait le sujet d'une rédaction.

PS : j'y reviendrai peut-être, je n'ai pas eu le temps de relire

 

 

Publié dans Témoignage

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A
Hareng ou pas hareng... c'est un bisou chaque jour. Alors le voilà !<br /> Gros bisou
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M
retardataire... mais je viens de lire ton texte. Un bonheur. D'abord tu m'apprends beaucoup car j'ignore les joies de la campagne, de ce que tu décris, et tu as les mots tellement justes que je le vivais, avec envie et nostalgie.. Aben tu as un style descriptif étonnant. A bientôt
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A
Tu sais que tu me donnes comme une grosse faim !!!<br /> Je te fais un trés gros bisou
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C
Tu me donnes envie avec ton feu. J'adore ça le feu. Surtout quand il crépite dans la cheminée que je n'ai pas........<br /> Je n'ai pas la provenance du trafic, je suis en confiance<br /> Bisous
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K
Tes harengs ont le merveilleux goût du souvenir
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