A tout bientôt Noël 5/7
Réveillons... les souvenirs
J'avais mis en ligne un article sur l'atelier de mes parents, le samedi 29 Octobre dernier. Je le remets ici pour notre petite Japonaise Rémoise, Zhealy. Il fait un peu doublon avec des propos tenus dans certaines des quatre notes précédentes mais en même temps les complète.
Rose est venue m'y mettre un commentaire dimanche dernier, (sur une note vieille de près de 2 mois...) ça m'a donné l'idée de la remettre pour mes nouveaux amis(es) .
Bonne lecture à ceux qui ne l'ont pas encore lu et que les autres me pardonnent cette "réédition"... à compte d'auteur !
Bon réveillon de ce soir à tous...
Les poupées de mon Père
Artisanat d'autrefois
Je suis né fils d'artisans, chez mes parents.
Pas dans la boutique, dans une chambre de la petite maison de style "entre deux guerres" que mon père avait fait construire, dans un grand jardin, avant d'épouser ma mère. C'est la sage-femme qui a prévenu ma maman que j'étais un garçon. Où qui lui a montré.
Ma mère était couchée, mon père était parti.
Pas pour de bon, seulement parti pour travailler...!
Enfin... vu l'heure que l'on m'a rapportée, il devait surtout "ne pas être rentré".
Qui donc avait bien pu prévenir l'accoucheuse...?
J'avais deux frères, de dix ans mes aînés et un de dix huit mois. J'arrivais quatrième... Pas mal, quand on est si petit...!
Artisan donc qu'il était, mon père. Il fabriquait des poupées. Des ours rouges et des chiens tachetés, en tissus bourré...
et des esquimaux à bonnets pointus...
des poupées chiffon avec des masques en carton...
des poupées de salon aux grands yeux très bleus, peints sur des faces en tissu, moulées au fer, à chaud, comme les chapeaux...
...et des poupées à tête en porcelaine, mains et pieds cousus au bout de leurs membres de tarlatane gonflés de paille d'acacias défibrés...
Jusqu'à tant que j'ai été petit, ma mère m'a emmené à l'atelier en voiture d'enfant. Elle devait mettre mon biberon sous la literie pour qu'il garde de la chaleur.
Tout en travaillant, l'un ou l'autre, souvent mon père, posait un pied sur une des roues de mon attelage et me berçait, pour me faire taire. Des fois aussi, c'était une ouvrière qui se penchait vers moi comme une fée sur un berceau, et me faisait un "guili-guili" dans un sourire.
Ca sentait bon dans l'atelier. La fibre de bois fraîche, la cotonnade de molleton découpé, le vernis cellulosique que l'on projetait au pistolet pour tigrer le dos des chats et tacheter les oreilles des chiens...
En hiver, les odeurs de "tolémail" fumant, de poussière de bois et de tissu qui se consumaient en brunissant sur le long tuyau du poêle, s'ajoutaient aux autres senteurs.
De tout petit j'ai vécu dans la boutique du père.
Lui, souvent à la scie, à découper les matelas de tissus : vingt quatre épaisseurs en accordéon, celle du dessus tracée des contours de ses patrons.
Toujours en vareuse, un cache-col fait maison pour protéger sa gorge fragile, un grand tablier comme ceux des jardiniers, avec, dans la poche kangourou, une ou deux craie tailleur, un crayon gras, un canif pour tailler ces marqueurs, une paire de grands ciseaux et aussi un paquet de tabac gris. Plus le cahier de feuilles à le rouler : un Riz-la-croix, rougge orangé, qui ne le quittait pas.
Tout en entraînant le tracé de son matelas jusqu'au rubuan de la scie, il surveillait son monde par dessus ses lunettes à demi-verres.
Ca parlait beaucoup dans la boutique. Ca chantait aussi. Ca plaisantait, colportait les potins du village...
Mon père laissait faire et laissait dire, jusqu'à ce qu'un silence trop long l'amène à réveiller son monde, où qu'une trop grande véhémence des propos en vienne à désordonner la gestuelle enseignée.
A l'age de l'école et jusqu'à mes quatorze ans, j'y suis venu prendre mon "quatre heures". Après mon certificat (de fin d'études primaires) j'y suis entré apprenti, comme d'autres de mon age. Des filles surtout, qui rembourraient les jouets, fixaient les oreilles et les yeux des animaux, habillaient les poupées... Des filles qu'il m'arrivait de fixer des yeux comme si elles étaient poupées...
- Tu rêves...?
Mon père m'apprenait la rigueur d'un métier