Le temps des vacances.
Parallélisme
(Partis ce matin à 8 heures de mon petit village de Champagne, nous arriverons vers 17 heures à notre pied à terre de Provence.
Je serai absent de mon ADLS jusqu'à début septembre.
Je regarderai mes mails tous les jours -et répondrai par mail à ceux et celles qui viendront faire un tour - mais je ne bloguerai pas. Ni en notes, ni en coms. Le bas débit exige trop de temps à passer...
Je vous laissse une petite note que j'aurais pu commencer d'écrire tout gosse et finir aujourd'hui... Sauf que gamin je n'avais pas d'ordinateur et qu'aujourd'hui, je conduis.
Merci encore à toutes et tous et bonnes vacances à ceux qui sont en âge de travailler. Aux autres, les retraités, qu'ils soient ici ou là, qu'ils n'oublient pas de se désaltérer : l'été va être chaud, comme le sont les étés.
A tout bientôt...)
Début des années 40, la Traction, une vieille 7/9 d'avant-guerre, blanc-alu avec des ailes noires, faisait sensation sur la Nationale 7.
Des villages à troupeaux de la Beauce, aux villages à platanes du Midi, sans encore de feux qui ouvrent ou ferment aujourd'hui le débit des voitures, elle allait klaxonnant pour écarter un chien, vitupérait un passant imprudent, jurait après un cycliste qui lui coupait la route, se faisait insulter par un charretier mécontent qu'on affole ses chevaux...
En traversée de Lyon, elle avait eu à attendre "au pied" (comme un Berger dressé ou un Setter irlandais) d'un feu par-ci, d'un sergent de ville par là, qui lui avaient donner l'ordre formel de s'arrêter à des carrefours pour laisser passer d'autres voitures, des motocyclettes et même des camions dont certains encore à gazogène enfumaient la chaussée... La honte !
Au redémarrage, elle avait fait crisser ses pneus. Pour dire son mécontentement et rappeler au monde qu'on lui devait du respect : elle qui était "la" Traction ! Celle des FFI, comme celle des pilleurs de banques... (Certaines avaient servi aux deux, pilotées par un conducteur qui avait fait ses armes comme pourvoyeur de tabac pour maquisards...)
Enfin, pas tout à fait cette traction là... mais la petite soeur de la noire, qui logeait onze chevaux sous le capot... avant qu'on lui en fasse accepter quinze.
Elle s'était arrêtée en Bourgogne, avait coincé quelques bouteilles parmi les bagages, et s'était encore arrêtée, un peu avant Villefranche, pour déjeûner en bord de Saône.
Elle allait son train, vibrait vers 110 Kmh, atteignait les 120 en descente. clignotait, klaxonnait encore, dépassait, s'arrétait, musardait... Elle ferait ses 60 - 65 Kmh de moyenne sur le parcours !
L'homme au volant, la femme sur le siège passager, les enfants à l'arrière, un garçon et deux fillettes entre quatre et sept ans...
Aucun ceinturé, qui jouaient avec les portières, celles de l'avant qui s'ouvraient à l'envers.
Ils étaient partis tôt, de Paris, arriveraient dans la nuit à Menton.
A Montélimar, ils prendraient du nougat. S'arrêteraient encore le soir pour un autre repas.
Ils prévoyaient une vingtaine d'heures pour faire le parcours sans trop de précipitation. Peut-être un peu plus, selon la circulation. Pilote et voiture avait l'expérience, au plus tard, il seraient rendus, avant le lever du jour.
Paris-Menton, en 1940, tout le monde ne pouvait pas le faire... Il fallait la santé, la voiture, le temps, et aussi l'occasion... et encore : de l'argent pour vivre des vacances sur la côte...
Ma femme somnole sur le siège passager, personne sur la banquette arrière. On vient de passer le tunnel de Fourvière.
Elle va sortir son Guide Michelin ou son Gault et Millaut et choisir l'endroit de notre repas : dans un village, en dehors de l'autoroute.
Elle réservera avec son téléphone portable pour s'assurer que l'établissement est bien ouvert.
Mon limiteur réglé sur cent trente deux, le thermostat sur 22°, la boîte automatique enclenchée, les deux pieds sous le fauteuil, j'écoute Chérie FM. De temps en temps, je zappe sur 107.7 : RAS/TVB, je remets la musique entrecoupée d'infos.
Je n'ai pas branché le GPS : depuis le temps, je connais la route par coeur. Je passe par où je veux, sans avoir à entendre la dame répèter "tournez à droite", "tournez à droite" jusqu'à ce qu'elle comprenne ce que je veux faire et qu'elle m'ordonne alors de "tourner à gauche" ! Comme l'Emile de Rousseau en crise d'autorité commandait aux nuages.
On prendra deux petites heures pour se détendre au calme bucolique du repas. Une bouteille de vin de région, dont on gardera les deux tiers pour le soir, décorera la table.
Quelques courses à l'hyper de la Foux, à deux kilomètre de l'arrivée, pour le pain, le bol de lait s'il fait chaud, une grillade peut-être, des fruits, une glace... ce soir, frais et dispos, on dinera à la maison devant les mêmes infos de la télévision.
De chez nous à chez nous, neuf heures de route nous auront reposés