Libération 4

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Un peu avant midi, on nous a fait descendre les cinq marches pour essayer les lieux. Les enfants d'abord, puis les femmes, les trois hommes restant le plus près de la sortie. Un rayonnage sommaire, adossé à la paroi du fond, serait garni de quelques vivres et préserverait quelques objets de valeur. Un peu d'argent, quelques bijoux, peut-être. Les femmes décideraient : elles se partageraient les quatre planches. Cela paraissait devoir aller. Si nécessaire, on pourrait même se croiser en se faisant petit, collés contre la terre. Il n'a pas beaucoup plu cet été. Pas du tout durant ce mois. Il fait beau, chaud, sans avoir à craindre d'orage.

Les madriers placés sur la tranchée ont reçu leurs balles de paille. On les a recouvertes de la terre du trou. Une dernière reste libre, à attendre à l'entrée. Elle servira, quand le dernier sera descendu (s'il y a lieu de descendre...) à fermer l'ouverture derrière lui.

- Si on n'a pas à s'en servir, après la guerre on pourra toujours y mettre du vin au frais ... a lancé mon oncle à son voisin. Une boutade pudique pour dire leur satisfaction de l'ouvrage et évacuer leur crainte.

C'est au quatrième jour que deux camions, arrivent par la route de Lesmont. On les entend sans encore les voir, masqués par les peupliers du champ à Martin. On ne peut pas encore dire s'ils sont militaires, mais deux camions à la fois, en cette période de guerre...

Mirette, la chienne bâtarde qui vit à la maison, oreilles dressées, tête penchée, confirme l'alarme d'un grognement prolongé... et on les voit, qui tournent à droite à la patte d'oie du calvaire Ils prennent sur Lassicourt. Ric garde l'entrée de la cour. Attaché à une chaîne accroché à un pieu fiché en terre, il va et vient et s'étrangle en aboyant. Sa course en va et vient creuse un sillon en arc de cercle dont le pieu est le centre.

Il s'agit bien de camions militaires. On voit sur chacun une grosse mitrailleuse en tourelle. Amis ? Ennemis ? Les chiens ne feraient pas de différence. L'intrus est l'intrus. Ils s'arrêtent derrière la grange, sur le bas côté opposé. S'abritent sous les grands saules qui bordent le parc à vaches derrière les barbelés. Coupent leurs moteurs et attendent.

 

interruption, je reprendrai...

Publié dans Témoignage

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