Libération1
J'étais tout gosse en 1944. Un peu plus de neuf ans aux grandes vacances. Avec un copain, et des fois tout seul, je montais en haut de la ruelle qui mène à la N60 pour voir passer les Américains. Des convois ininterrompus, qui traversaient le village. Venant de Troyes, allant sur Brienne. Des GMC, des Half-tracks, des tancks, des Jeeps, des Dodges...
On faisait des grands signes avec les bras pour saluer les soldats. Surtout ceux qui roulaient toutes vitres ouvertes. On les "acclamait", tout en guettant le passager d'à côté du conducteur. C'est lui qui nous lançait les cadeaux de remerciements. Du chewin-gum, des tubes et des boites, des rations de soldats, des sachets de poudres. Souvent, on ne savait pas ce qu'il y avait dans les tubes. Ni dans les sachets : tout était écrit en américain...
Alors on essayait. On pressait le tube pour faire sortir un peu de "crême" et on goûtait On les essayait un peu à tout, les ingrédients douteux. A se laver les dents, se gominer les cheveux, s'en étaler sur la figure. A part la moutarde qu'on reconnaissait à son piquant, je ne me souviens pas de beaucoup d'autres choses que l'on ait reconnues.
Pour ce qui est des rations et des boites de viandes, on les donnait tout fiers aux parents. On gardait le chewing-gum qu'on avait à mâcher en cachette...
J'avais neuf ans fin d'été 1944